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Changer de vie grâce à la fiction : comment ces 3 livres m’ont transformée

En quoi la fiction peut changer une vie ?

La fiction n’est pas seulement un miroir du monde. Elle est aussi une loupe, un scalpel, parfois un refuge. Écrire permet de créer un monde, un univers; lire transforme notre manière de percevoir les autres, mais aussi de nous percevoir nous-mêmes. À travers trois œuvres très différentes, Jane Eyre de Charlotte Brontë, À la recherche du temps perdu de Marcel Proust et Et Nietzsche a pleuré d’Irvin D. Yalom, j’ai non seulement évolué comme lectrice, mais aussi comme autrice … et comme personne.

Jane Eyre : l’apprentissage de la dignité

Jane Eyre, l’héroïne de Charlotte Brontë, n’a rien de spectaculaire, et c’est justement cela qui la rend inoubliable. Orpheline rejetée, maltraitée par sa tante, puis envoyée dans une école quasi-carcérale, elle traverse l’enfance sans jamais sombrer dans la haine ou la complaisance. Là où d’autres personnages auraient joué les victimes, Jane choisit la résilience silencieuse, soutenue par les figures lumineuses que sont Hélène Burns, Bessie ou Miss Temple. Ces femmes, discrètes mais puissantes, agissent comme autant de phares dans la nuit de sa jeunesse.

Ce qui m’a bouleversée dans ce roman, c’est la capacité de Jane à s’aimer sans arrogance, à revendiquer sa valeur sans écraser l’autre. Elle ne se travestit jamais pour plaire : « Je ne suis pas un oiseau, et aucun filet ne m’enveloppe. Je suis libre, avec une volonté indépendante, et je m’en sers pour vous quitter. » Cette phrase, si simple, m’a longtemps poursuivie. Elle m’a appris que l’indépendance n’a rien d’agressif ; c’est un état d’esprit qui tient debout même lorsqu’on est seule dans une pièce.

Son attitude envers Adèle, sa jeune élève, révèle une autre leçon : ne pas reproduire les souffrances qu’on a connues. Jane élève l’enfant avec douceur, sans cruauté pédagogique ni humiliation. Elle reste fidèle à ses valeurs, allant jusqu’à renoncer à Rochester par principe, un acte de force immense à une époque où les femmes n’avaient souvent que l’amour pour seule monnaie d’échange.

Quand finalement elle devient riche, elle reste simple et généreuse. Son sens du devoir ne se flétrit pas, et elle demeure fidèle à elle-même sans se sacrifier sur l’autel du devoir. Elle m’a appris qu’on peut changer de vie en affirmant son indépendance sans hostilité.

À la recherche du temps perdu : le vertige de la mémoire

Lire Proust, c’est comme ouvrir une malle pleine de souvenirs qui ne sont pas les nôtres, mais qu’on reconnaît pourtant intimement. Sa prose sinueuse, ses phrases longues comme des tunnels de verre, m’ont appris que la littérature pouvait explorer l’âme humaine avec une précision presque chirurgicale. Il y a chez lui une ironie douce, parfois cruelle, sur le monde des apparences, la société, les snobismes. Mais surtout, il y a cette obsession de la mémoire, cette idée que le passé n’est jamais mort, mais simplement endormi quelque part dans une madeleine ou dans le moelleux d’une robe de chambre confortable.

Proust m’a obligée à ralentir. À prêter attention à l’invisible, aux détails, aux transitions d’une pensée à l’autre. Depuis que je l’ai lu, je n’écris plus de la même manière. Je cherche à traduire les atmosphères, les silences, les impressions fugitives. J’ai aussi compris qu’on peut faire œuvre de tout, même de ses angoisses ou de ses névroses. L’introspection peut devenir un projet littéraire et un chemin pour changer sa vie intérieure.

Et Nietzsche a pleuré : la fiction comme psychanalyse

Irvin Yalom mêle ici fiction et philosophie pour imaginer une rencontre entre Nietzsche et Josef Breuer, un médecin interniste viennois. Mais le véritable sujet du roman, ce n’est pas Nietzsche : c’est le médecin lui-même, qui se transforme à travers le dialogue. Ce retournement m’a profondément marquée : on pense lire l’histoire d’un homme brisé que l’on va soigner… et on découvre que c’est le « soignant » qui va devoir faire face à ses propres blessures.

Ce roman m’a amenée à entamer une véritable réflexion personnelle, presque une thérapie littéraire. À chaque page, je me suis appliqué le jeu du questionnement entre Breuer et Nietzsche :

  • Est-ce que je vis ma propre vie… ou la vie que les autres attendent de moi ?
  • Si je pouvais recommencer à zéro, que garderais-je de ma vie actuelle ?
  • Qu’est-ce que je me pardonnerai jamais ?
  • Et donc, jusqu’où suis-je prête à aller dans ma propre honnêteté émotionnelle ?

Comme dans l’écriture de fiction, il faut parfois oser creuser sous les masques. Changer de vie commence souvent par une prise de conscience personnelle.

Écrire pour changer de vie

Ces trois livres m’ont appris que la fiction peut être un outil de transformation. Elle nous offre des modèles, des miroirs, des questions. Jane Eyre m’a transmis la dignité et la force silencieuse. Proust m’a montré que l’introspection pouvait devenir poésie. Yalom m’a poussée à me regarder en face.

Aujourd’hui, quand j’écris, je ne cherche plus seulement à raconter une histoire. J’essaie de comprendre ce que cette histoire dit de moi, comment elle peut changer ma vie et, parfois, toucher celle des autres. Car écrire, c’est peut-être cela : faire un pas de côté dans le monde pour mieux y revenir, un peu plus lucide, un peu plus entier et peut-être un peu plus libre.

Et toi, quels romans t’ont émerveillé(e), bouleversé(e), chamboulé(e) ???

Cet article participe à l’événement « Les 3 livres qui ont changé ma vie » du site Des Livres pour changer de vie qui rassemble une somme de (longs) résumés, allant de la biographie de personnes exceptionnelles, au développement personnel, à la créativité ou au marketing.

Instructif dans de nombreux domaines, il va sans dire que c’est l’écriture, la fiction surtout, qui m’appelle de toutes ses voix. Et particulièrement la plume de Stephen King qui raconte ses mémoires et conseille (voire fustige) les auteurs en herbe dans « Ecriture : mémoires d’un métier ».

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