Défi 101 jours

Comment raconter l’abandon avec l’ennéagramme

Dans cet article
  1. Défi 101 jours – Jour 9
  2. Pourquoi le texte résonne avec l’ennéatype 4 ?
  3. Comment un 4 pourrait utiliser l’écriture pour avancer ?
  4. Un texte « très 4 », mais qui peut évoluer

Défi 101 jours – Jour 9

« Un jour, il s’était senti seul, tout seul. Il était encore tout petit, cinq ans max. Lily n’était plus là, et personne ne voulait lui dire où elle était. Maman pleurait souvent et elle s’occupait de moins en moins de lui. Un jour, elle l’avait giflé parce qu’il avait hurlé qu’il voulait Lily. Maman l’avait regardé avec des flammes dans les yeux. Et de la folie, mais il ne le comprenait pas bien. Elle était partie elle aussi. À l’hôpital, parce qu’elle était malade. Peut-être qu’elle était avec Lily ? Il n’osait pas demander.

Alors c’était Papa qui s’occupait de lui. Il était gentil, mais il ne souriait pas. Il était pâle, fatigué et sa voix tremblait souvent. Il devait travailler aussi. Donc lui, petit Gabriel, allait souvent chez Sylvia, la voisine, qui était gentille et avait plein d’enfants qui faisaient beaucoup de bruit. Ça changeait de la maison qui avait l’air d’être devenue plus grande et très silencieuse.

Puis un jour, Granny et Popa était venus parce que Papa devait partir en voyage pour son travail. Eux aussi ils étaient gentils. Mais Granny pleurait beaucoup. Papa ne revenait pas de voyage. Il écrivait des lettres de là-bas, très loin en Amérique. Puis un jour les lettres n’arrivèrent plus.

Encore un peu plus tard, il était parti en voiture avec eux. Il s’était endormi et au réveil, il était dans une chambre toute blanche avec un gros pansement à la tête. Une gentille dame avec un tablier blanc et un drôle de petit bonnet blanc s’occupait de lui. Elle changeait son pansement, lui donnait à manger, le lavait. Elle s’appelait Connie. Mais ni Lily, ni Maman, ni Papa, ni Granny et Popa ne lui rendaient visite. Et il se sentait tout seul et très triste. Parce qu’ils étaient peut-être partis faire un pique-nique tous ensemble, sans lui, ou même en vacances, et il avait l’impression qu’il ne comptait pour rien, qu’il ne valait rien, qu’il n’était pas gentil et qu’il ne méritait pas qu’on s’occupe de lui. Parfois, il étouffait, parce que tout le blanc de sa chambre lui faisait peur. Il devait respirer plus vite et plus fort pour avoir de l’air, mais ça passait mal dans son nez et dans sa gorge.

Cinq ans, c’était petit pour être tout seul. Enfin, six ans, parce que son anniversaire était passé, mais personne ne le lui avait souhaité. Pas de fête, pas d’ami, pas de Lily… Tout seul et tout triste… »

À la relecture du texte, et avec la grille de l’ennéagramme, plusieurs éléments font penser que le personnage de Gabriel a tout de l’ennéatype 4. Mais qu’est-ce que ça signifie ?

Pourquoi le texte résonne avec l’ennéatype 4 ?

🔴 Le sentiment d’abandon et de solitude existentielle
Le texte est construit autour d’un sentiment profond d’abandon : les figures d’attachement disparaissent les unes après les autres (Lily, la mère, le père, les grands-parents…) Chez un type 4, la blessure centrale est justement celle du rejet ou du manque. Il ressent un vide intérieur, une impression de séparation irrémédiable d’avec les autres.

🔴 La tendance à se sentir “différent”, exclu d’un bonheur partagé
Le passage où Gabriel imagine que les autres sont en pique-nique sans lui est très révélateur. C’est une pensée typique du 4 : les autres ont accès à quelque chose que moi je n’aurai jamais. Ce type vit souvent avec la conviction intime qu’il lui manque quelque chose pour être pleinement aimé et intégré.

🔴 Une mélancolie presque poétique face à la douleur
Quand le 4 parle de sa douleur, il ne raconte pas seulement une souffrance brute, il la met en scène de façon tragique en veillant à l’esthétique de son expression. Il y a un goût pour l’introspection, une recherche de sens à travers la tristesse. Chez ce type, la souffrance est souvent sublimée, transformée en quelque chose d’artistique ou d’émotionnellement intense.

🔴 L’identification à l’émotion et l’intensité du ressenti
Le 4 vit à travers ses émotions, et dans le texte, la douleur de l’abandon n’est pas seulement un fait : elle est une atmosphère qui engloutit tout, jusqu’à la perception du monde (le silence pesant, la chambre blanche qui étouffe…). L’émotion devient une réalité tangible, ce qui est typique du 4 qui a du mal à prendre du recul sur son ressenti.

🔴 La croyance inconsciente : « Je ne vaux rien »
Quand l’enfant en vient à penser qu’il ne mérite pas qu’on s’occupe de lui, il met en place une croyance douloureuse. C’est un mécanisme profond du 4 blessé: il ressent un vide, et au lieu de voir la situation comme un problème extérieur (ex : « les autres sont absents »), il l’intègre comme une vérité sur lui-même (« je suis fondamentalement indigne d’amour »).

Comment un 4 pourrait utiliser l’écriture pour avancer ?

Quelques pistes d’écriture qui pourraient inspirer un 4 pour travailler cette blessure :

1️⃣ Réécrire l’histoire en trouvant du soutien
Le 4 a tendance à voir la perte et l’abandon, mais il oublie parfois les figures bienveillantes qui ont existé. Et si on réécrivait l’histoire en mettant en lumière une présence rassurante (la voisine Sylvia, l’infirmière à l’hôpital) ? L’idée n’est pas de nier la douleur, mais d’entraîner le cerveau à ne pas voir uniquement le manque.

2️⃣ Transformer la douleur en force créative
Le 4 a ce don incroyable : il peut transmuter sa souffrance en quelque chose de beau. On pourrait pousser plus loin l’écriture en transformant cette histoire en conte, en poésie, en roman initiatique… Donner une forme à la douleur, c’est déjà en reprendre le contrôle.

3️⃣ Sortir de l’identification à la tristesse
Un défi du 4, c’est qu’il peut parfois se complaire dans ses émotions intenses. Un bon exercice serait d’écrire une scène de cette histoire, mais avec une autre émotion dominante que la tristesse :

  • De la colère (contre l’injustice de la situation)
  • De l’humour noir (comment un enfant pourrait voir ces situations avec une naïveté drôle ?)
  • De la résilience (et si cet enfant trouvait en lui une ressource insoupçonnée ?)

Le but n’est pas d’effacer la douleur, mais d’expérimenter d’autres manières de la raconter, pour ne pas s’enfermer dans un seul registre émotionnel.

Un texte « très 4 », mais qui peut évoluer

Ce texte capture avec la blessure et la sensibilité du type 4 : la solitude existentielle, le sentiment d’exclusion, la mélancolie comme compagnon de route. Mais l’écriture peut aussi être une manière de transformer cette douleur en quelque chose de plus grand, de plus riche, de plus vaste qu’une simple souffrance figée.

💡 L’objectif n’est pas d’effacer la blessure, mais de lui donner un sens qui libère, plutôt que d’en faire une identité qui enferme.

Si vous avez aimé l'article, vous êtes libre de le partager :-)

Laisser un commentaire