Défi 101 jours

Les constellations familiales  pour vivre le deuil sereinement

Défi 101 jours – Jour 23

« Quand il regardait en arrière, ça faisait déjà longtemps qu’il avait vécu plus de temps sans son père qu’avec lui. Un quart de siècle… Il avait 17 ans quand son père n’était pas revenu de ce reportage en Asie Centrale. Il en était resté pétrifié. Son père était souvent parti, les reportages le conduisait dans des tas d’endroits peu recommandables. Quand il était là, il s’opposait souvent, c’était de son âge. Mais d’un coup il n’avait plus ce rempart, cet homme solide sur qui compter, cette résistance à laquelle se mesurer, faire ses griffes et ses dents. Il vivait sous les reproches de sa mère, frustrée par une vie qu’elle avait choisie par défaut.

Avec le recul, il se rendait compte à quel point il avait bloqué ses émotions, pour de tenir le coup, faire front, de continuer à avancer dans sa vie sans s’effondrer. 25 ans après, il se demandait s’il n’aurait pas mieux valu qu’il s’effondre temporairement, qu’il pleure toutes les larmes qui étaient venues l’envahir et qu’il réprimait le plus possible. Il aurait dû pleurer dans les bras d’un copain qui l’aurait soutenu et taquiné de pleurer comme une fille, parce que la vague d’émotions l’aurait ensuite quitté pour laisser la place aux souvenirs heureux, aux moments complices qu’il avait trop peu connus.

Quand son père était mort, il avait dû faire le deuil de l’homme, mais aussi de tous ces moments qui n’existeraient plus jamais et de la complicité qui n’avait pas eu le temps de vraiment se développer, de ces moments d’homme à homme qu’il n’aurait pas l’occasion de vivre. 25 ans, c’était vertigineux. Il avait retenu son souffle. Maintenant quand la vague l’envahissait, toujours au mauvais moment, devant ses élèves par exemple, il la réprimait de nouveau. Il fallait qu’il la contacte quand il pouvait la laisser s’exprimer. Ou oser la laisser prendre toute sa place quand elle venait, peu importe les circonstances.

Il pressentait qu’il devait sentir cette vague, la laisser se glisser en lui et par-dessus lui, sentir sa gorge se serrer, puis se desserrer. Penser à ce jeune garçon qu’il avait été, démuni, armé seulement de leçons de l’ordre de « prends sur toi ». Mais quand on prend trop sur soi, ça pèse sur les épaules. Il finirait par se voûter… »

Dans cet article
  1. Défi 101 jours – Jour 23
  2. La grande traversée
  3. Le deuil figé : quand l’émotion ne circule plus
  4. Les constellations familiales : un espace pour voir l’invisible
  5. Reprendre position dans son histoire : chacun à sa place
  6. Accueillir l’émotion au lieu de la réprimer
  7. Transformer le deuil en mouvement intérieur
  8. Comment faire?

La grande traversée

Le deuil est une traversée intérieure. Ce n’est pas juste une étape que l’on franchit avant de « passer à autre chose » comme on voudrait souvent nous le faire croire. C’est un chemin complexe, parfois sinueux, qui peut laisser des traces invisibles mais profondes.

Certains deuils se font naturellement. D’autres restent figés, nous bloquant dans un état où l’émotion peine à circuler. C’est le cas du personnage du texte que nous avons sous les yeux. 25 ans après la mort de son père, il sent que quelque chose en lui n’a pas été résolu. Une vague émotionnelle refait surface à des moments inopportuns, et il s’efforce encore de la réprimer.

Et si cette vague, au lieu d’être un fardeau, pouvait devenir une porte d’entrée vers une véritable liberation ?

C’est précisément ce que permettent les constellations familiales, dont on a déjà parlé, qui explorent les liens invisibles qui nous relient à nos ancêtres et aux événements marquants de notre histoire.

Alors, comment les constellations familiales peuvent-elles aider à traverser un deuil bloqué, à retrouver une relation apaisée avec un défunt et à faire la paix avec les émotions qui n’ont pas pu être vécues au moment de la perte ?

Le deuil figé : quand l’émotion ne circule plus

Le personnage du texte raconte son deuil de manière presque clinique, avec une prise de conscience tardive : il a bloqué ses émotions pour ne pas s’effondrer.

« Avec le recul, il se rendait compte à quel point il avait bloqué ses émotions, pour tenir le coup, faire front, continuer à avancer dans sa vie sans s’effondrer. »

C’est une réaction courante. Lorsqu’un événement est trop douloureux, surtout lorsqu’on est jeune, l’esprit met en place des mécanismes de protection. On garde le cap, on se contient, on fait face.

Le problème, c’est que ce qui n’a pas été vécu à l’époque ne disparaît pas. L’émotion reste quelque part, en suspens, et elle ressurgit parfois de manière inattendue :

« Et maintenant quand la vague l’envahissait, toujours au mauvais moment, devant ses élèves par exemple, il devait de nouveau la réprimer. »

Ce qui est refoulé finit toujours par faire surface. Mais tant qu’on refuse de le regarder en face, on reste enfermé dans un schéma de fuite et de contrôle.

La première étape d’un travail en constellation familiale est justement d’arrêter de fuir et d’oser regarder l’émotion en face.

Les constellations familiales : un espace pour voir l’invisible

Les constellations familiales partent du principe que nous sommes tous liés à notre système familial, et que certaines souffrances sont non seulement personnelles, mais aussi transgénérationnelles.

Lorsqu’un deuil n’a pas été pleinement vécu, il peut créer un déséquilibre dans ce système. Dans le cas de notre personnage, plusieurs éléments pourraient être explorés lors d’une constellation :

  1. La relation avec le père
    • Il n’a pas seulement perdu son père, il a aussi perdu ce qui aurait pu exister entre eux.
    • Il porte peut-être encore un manque de reconnaissance ou un besoin d’approbation non comblé.
  2. Le rôle de la mère
    • Elle aussi porte un poids, celui d’une frustration, d’une vie subie.
    • Il a grandi sous ses reproches, ce qui a pu renforcer son besoin de retenir ses émotions.
  3. La transmission inconsciente
    • Que s’est-il passé dans les générations précédentes ?
    • Y a-t-il eu d’autres hommes disparus trop tôt ?
    • Porte-t-il, sans le savoir, une douleur qui ne lui appartient pas entièrement ?

Reprendre position dans son histoire : chacun à sa place

L’un des principes fondamentaux des constellations familiales est de remettre chacun à sa juste place. Lorsqu’un enfant perd un parent trop tôt, il peut inconsciemment essayer de prendre sa place ou de porter un poids qu’il n’a pas à porter.

Dans la constellation, le facilitateur peut proposer une phrase clé pour rétablir cet équilibre :

« Papa, tu es mon père et je suis ton fils. C’est toi le grand, moi le petit. Aujourd’hui, je te rends ce qui t’appartient. »

Ce type de phrase peut sembler anodin, mais elle agit en profondeur. Elle permet de décharger l’enfant devenu adulte d’un poids émotionnel qu’il portait sans en avoir conscience.

En constellation, cela peut se matérialiser par un déplacement physique : le représentant du père recule légèrement, le fils reprend sa place et sent l’espace se modifier intérieurement.

Accueillir l’émotion au lieu de la réprimer

L’une des prises de conscience les plus importantes du personnage est qu’il a besoin de sentir la vague émotionnelle au lieu de la contenir.

« Il pressentait qu’il devait sentir cette vague, la laisser se glisser en lui et par-dessus lui, sentir sa gorge se serrer, puis se desserrer. »

C’est exactement le travail que permettent les constellations : expérimenter dans un cadre sécurisé ce qui n’a pas pu être vécu à l’époque.

  • Pleurer l’absence d’un père.
  • Ressentir le manque de moments de complicité.
  • Accepter la vulnérabilité et la laisser s’exprimer.

Dans la constellation, le fils pourrait oser exprimer ce qu’il n’a jamais pu dire. Et parfois, le représentant du père pourrait répondre, donnant ainsi une forme de réparation symbolique.

Faire du deuil un espace de transmission et non de blocage

Enfin, l’un des aspects les plus intéressants de l’évolution du personnage est qu’il commence à voir sa vulnérabilité non plus comme une faiblesse, mais comme une leçon d’humanité.

«… oser la laisser prendre toute sa place quand elle venait, peu importe les circonstances. »

En constellation, cette prise de conscience peut se matérialiser par une nouvelle posture :

  • Ne plus lutter contre l’émotion, mais l’intégrer.
  • Ne plus avoir honte de la vague qui monte, mais accepter qu’elle fasse partie de lui.
  • Faire du deuil un espace de transmission, où montrer sa vulnérabilité devient une force pour les autres.

Le père n’est plus seulement une absence. Il devient une présence intérieure qui accompagne et soutient.

Transformer le deuil en mouvement intérieur

Le travail en constellation permettrait à ce personnage (et à toute personne vivant un deuil figé) de :

Revoir la relation avec le père sous un autre prisme.
Se replacer dans son histoire et alléger son rôle.
Expérimenter l’émotion bloquée et la laisser circuler.
Intégrer la vulnérabilité comme une force et non une faiblesse.

Le deuil ne disparaît pas, il peut changer de forme, ne plus être un poids figé mais au contraire un mouvement intérieur qui nous rend plus vivants.

Et si, au lieu de réprimer la vague, on osait la laisser nous traverser ? 🌊

Comment faire?

En écrivant! 😊

Essayez cet exercice: multiplier les points de vue

  • Écrivez le deuil de votre personnage sous différents angles : celui du père disparu, de la mère frustrée, du jeune garçon en deuil, mais aussi d’un ami, d’un professeur ou d’un inconnu qui aurait été témoin de sa douleur sans pouvoir l’exprimer.
  • Cela vous permettra de prendre du recul et d’élargir votre compréhension des dynamiques autour de cette perte.

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2 commentaires

  • Flore du Web

    De mon côté je rêve souvent des personnes qui s’en sont allées. Je ne sais pas si je n’ai pas fait réellement le deuil, mais j’aime bien quand elles me rendent visite. C’est toujours très doux.

    • Caroline

      Que penses-tu, toi, sur le fait d’avoir fait le deuil ou non?
      De mon point de vue, si c’est doux et que ça ne te plonge pas dans la tristesse, c’est plutôt super positif (mais je ne suis pas à ta place 😉 )

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